A côté de ce nouveau 21 avril 2002, la bataille de Paris fait bien pâle figure et semble n'intéresser que les Parisiens.
Autre enseignement de ce scrutin : l'abstention - avec cette particularité que, selon des analystes très pointus, même le Front national n'a pas fait le plein de ses voix ! Inouï.
Au final, ce premier tour a été un cinglant désaveu pour le gouvernement (qui porte encore l'étiquette de) écolo-socialiste de François Hollande.
Mais j'ai beau zapper, zapper et rezapper sur les chaînes de télévision, les radios, etc., je n'ai pas encore trouvé une once de réponse à trois questions qui s'imposent après ce premier tour de scrutin municipal.
Chaque fois que le pouvoir en place perd une élection, on y a le droit. C'est comme les journaux de presse écrite à la rentrée scolaire de septembre : faut tout changer, quitte à paumer le lectorat qui a ses habitudes et perdre des lecteurs qui ne s'y retrouvent plus. On change la forme mais pas le fond : ce sont juste les mêmes infos, rangées autrement.1. Un remaniement ministériel, pour quoi faire ?
En matière de gouvernement, à quoi sert un tel jeu de chaises musicales ? Si le ministre était mauvais à son poste, il fallait le dégager avant ! Et qu'est-ce qui me dit qu'il sera meilleur dans un autre ministère ? Et qu'est-ce qui me prouve que le nouveau sera plus compétent ? En définitive, les mêmes têtes, ailleurs, et d'anciennes têtes de retour.
Si ce gouvernement supposé de gauche n'a pas le courage politique de mener une réforme profonde de notre société, nous mettre Untel Premier ministre à la place de Telautre et redistribuer les maroquins est totalement vain. Un cautère sur une jambe de bois.
Perdu pour perdu, au lieu d'attendre la prochaine échéance présidentielle ou législative en serrant les genoux, autant mener une politique ambitieuse, nous foutre dans la merde profondément pour nous en sortir lentement (j'imagine) mais nous relever durablement. Prendre des mesures à long terme, en les expliquant bien : peut-être que les électeurs ne sont pas si cons que cela et laisseront le temps au temps, au lieu de survivre avec des mesurettes que l'on sait périssables.
Quand j'étais môme, à l'école, en matière d'économie, on apprenait qu'il y avait trois secteurs : le primaire - l'agriculture qui nourrit un pays -, le secondaire - l'industrie qui fabrique des produits manufacturés et permet aux ouvriers de vivre (certes, parfois chichement) de leur salaire - et le tertiaire - les services, les administrations, le putain de télémarketing qui fait chier sa race.
Où en sommes-nous aujourd'hui ? En simplifiant...
L'agriculture : les paysans produisent à perte mais survivent grâce aux subventions européennes (je schématise). Pendant ce temps-là, qui s'en fout plein les fouilles en profitant du travail harassant des paysans et du fric européen ? Les grandes surfaces dont le seul but est de faire du chiffre.
L'industrie : pas assez rentable en France, on délocalise là où les ouvriers sont moins payés et ferment leurs gueules (quoique, en Asie, ça commence à ruer dans les brancards). Le but ? Faire du chiffre pour rémunérer les actionnaires. L'investissement ? Euh... Mais où avez-vous vu qu'un pays, où les chômeurs sans le sou ne peuvent se payer les produits qu'ils fabriquaient jadis mais qui sont faits ailleurs désormais, est viable économiquement ? La suprême ironie étant que, dans les pays où les industries délocalisent, les ouvriers n'ont pas les moyens de se payer ce qu'ils fabriquent !
Les services : on a l'impression qu'il n'y a plus que ça en France - quoique ça délocalise aussi sévère dans le tertiaire privé. Moi, à l'école, j'ai appris qu'un pays qui "vivait" principalement du tertiaire, ça s'appelait un pays sous-développé - on dit "émergent", maintenant, ça fait moins pauvre.
Bref, tout cela entraîne un appauvrissement des populations, des flux migratoires, de la xénophobie dans les pays vers lesquels se dirigent ces flux, la montée du racisme et des partis nationalistes.
Le maître-mot est de remettre tout dans des proportions acceptables : autoriser des profits raisonnables, inciter à l'investissement sur le territoire national, réindustrialiser la France, permettre in fine au Smicard de se payer, parfois, du rêve et, chaque année, des vacances bien méritées. Le tout en ne tuant pas notre planète.
Putain, ça fait du boulot ! Mais j'ai jamais dit que ce serait facile.
La nouveauté des municipales 2014, c'est la loi électorale, qui imposait aux communes de plus de 1000 habitants un scrutin de liste avec parité homme-femme (pour la parité noir-blanc, homo-hétéro, riche-pauvre, etc. va falloir encore attendre un peu).2. Des listes élues à 100% des suffrages : personne ne tique ?
A voté ! (copyright Le Tampographe Sardon) |
Le choix était donc réduit à : 1. s'abstenir 2. voter pour l'unique liste 3. voter non-exprimé (nul, blanc, enveloppe vide).
Au décompte final, seuls les bulletins exprimés comptent et on a vu tomber comme à Gravelotte, dimanche soir, des scores à 100%. Mieux que le référendum en Crimée (seulement 96,6%) !
Vous trouvez ça très démocratique, vous ?
Vous ne pensez pas que ça favorise l'abstention, vous, ce genre de non-choix ?
Il faudrait revoir la copie de cette nouvelle loi électorale. A minima, passer la barre des 1000 à 2500.
Même s'il restera toujours des exceptions, comme cette ville de plus de 10000 habitants dans laquelle une liste ne s'est pas montée faute de femmes. Ou comme ce village de la Marne, de 289 électeurs, non soumis à la parité, dans lequel, sur les trois candidats au premier tour, seuls deux ont été élus ; il faudra, au pire, sept élus de plus et, au mieux, neuf, au second tour, pour constituer un conseil municipal, sachant que ça ne se bouscule pas au portillon des candidatures.
Une autre nouveauté des municipales 2014 était que l'électeur désignait ses représentants au conseil communautaire. Un peu comme aux Etats-Unis d'Amérique où on vous fait un grand paquet, contenant le Président du pays jusqu'au shérif de sa ville.3. Conseillers communautaires : on vote, vous êtes sûrs ?
On désigne, vous êtes sûrs ? En fait, de nouveau un référendum : dans les communes de plus de 1000 habitants, avec scrutin de liste, qui n'ont qu'un représentant au conseil communautaire, le candidat était forcément la tête de liste et futur maire (à moins de coup de théâtre lors de l'élection du maire et des adjoints, ça s'est déjà produit). C'est donc un candidat imposé ; on donne son aval... ou pas. Et si on raturait le candidat (ou la candidate, plus rarement), tout le bulletin, sur lequel se trouvait aussi la liste pour le conseil municipal, devenait nul (vote non exprimé).
Quelle poudre aux yeux. Nous faire croire qu'on choisit.
Le vrai choix aurait été qu'on puisse voter pour tous les représentants au conseil communautaire, avec des listes politisées ou non, qu'on aurait pu panacher (bon, OK, bonjour le bordel du dépouillement).
Je m'explique.
Prenons le cas d'une communauté de 78 (au hasard) communes dont le conseil est composé de 119 membres (presque au hasard). Au conseil communautaire, quand il s'agit de prendre des décisions, la majorité absolue est donc, algébriquement, de 60.
Il s'avère que la ville principale de cette communauté a 26 sièges. Que sa banlieue, deuxième ville, en a 9. Que d'autres communes, historiquement dans la première communauté, totalisent 20 sièges. Cela nous fait 55 à bouffer au même râtelier depuis quelques années.
Maintenant, que pèsent les treize communes qui ont rejoint récemment cette communauté, avec leurs 13 voix face à l'armada de 55 ? Pas grand chose. Il est plus facile de trouver 5 sympathisants que 47 quand il s'agira de refiler la gestion de l'eau à une entreprise privée, qui quadruplera le prix du mètre cube.
Le vrai choix, pour l'électeur, aurait été de voter pour une liste de conseillers communautaires avec un programme ad-hoc pour les 78 communes.
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