mardi 1 avril 2014

Mon voisin, le pauvre...

Comme par hasard, au lendemain de l'indéniable percée du Front national aux élections municipales, circule de nouveau, sur les réseaux sociaux, ce document mensonger (capture d'écran ci-dessous), une incitation, de fait, à la haine, à la xénophobie rageuse.

Tout cela n'est que pure propagande et il est aisé de comprendre d'où ce malfaisant comparatif provient. Et de démolir cette argumentation comme l'a si bien fait Gégé de Radiossa, relayé par HornedGod, ici.
Et puis, allons, un peu de bon sens : comment pouvez-vous croire un seul instant que quelqu'un qui n'a pas de travail touche plus d'argent que quelqu'un qui bosse ?
Et c'est là qu'intervient mon voisin.
Pas mon voisin retraité, qui possède sa maison mais est obligé de vendre du bois et de faire des petits boulots pour arrondir ses fins de mois.
Pas mes voisins qui, avec leur encore trois mômes, cinq chiens, deux chats et autres perruches, vivent dans un des trois pavillons HLM de mon bled - lui étant chauffeur-livreur et elle, chômeuse, fabriquant de petits meubles très laids dans un abri de jardin.
Non.
Ceux dont je veux vous parler, c'est ce couple qui vit maritalement. Lui est au chômage. Elle, cinq jours sur sept - et, parfois, le samedi -, fait les 3x8 pour un SMIC mensuel, à une demi-heure de route de leur maison en location.
A l'origine, ils avaient tous les deux un boulot de smicard et se sont installés dans mon bled parce que ça les mettait, chacun, à peu près à mi-distance de leurs lieux de travail respectifs.
Puis, par la faute de la crise (elle a bon dos, NDR), il a perdu son emploi. Indemnisé par les Assedic puis Pôle-emploi pendant deux ans, cela fait maintenant presque trois ans qu'il ne touche plus rien et ne trouve pas davantage de boulot. En plus, il a des problèmes de santé et est proche de la cinquantaine : ça noircit un peu plus le tableau.

155,41 euros/mois pour "vivre"

Mon voisin, lui, ce que gagnent les autres, il s'en fout. Il n'est pas du genre envieux. Il veut juste de quoi vivre, mettre un toit au-dessus de sa tête, manger, de temps en temps se faire des merguez au barbecue l'été et avoir chaud l'hiver... Et il sait bien que ce n'est pas en critiquant un autre pauvre que ça l'enrichira. Et puis, il refuse d'être assisté parce qu'après, l'artisan du bout de la rue le traiterait de fainéant qui profite du système et ça, mon voisin, il ne le supporterait pas : il a sa dignité.
De toute façon, mon voisin, à part l'allocation logement, il n'a droit à rien. Parce que sa concubine travaille et gagne le SMIC.
Alors, le remaniement ministériel, la nomination de Valls, la défaite cuisante des socialistes aux municipales, la poussée du FN, tout ça, ça lui passe un peu au-dessus de la tête. De toute façon, on vit dans un bled, alors la politique, vous savez : ici, on vote pour des gens qu'on connaît, qu'on aime bien, qu'on sait compétents pour diriger la commune. Et de toute façon, mon voisin, il n'a pas été voter : ça aurait servi à quoi ? Le résultat aurait été le même.
Bon, après, s'il ne vote pas, il ferme sa gueule, va objecter l'artisan du bout de la rue. C'est ce qu'il fait. A peine se plaint-il qu'on va encore augmenter le prix du gaz de 7,5% d'ici 2016 au nom de la taxe carbone (c'est pas grave, il mangera froid, NDR). Sinon, il ne demande rien à personne.
C'est moi qui suis allé lui demander un truc.
Et il a bien voulu que j'établisse le tableau de son cas particulier (ci-dessous, cliquez dessus pour mieux ne pas en croire vos yeux) avec les chiffres qu'il pouvait me fournir.

Voilà. Moi, je me demande bien comment on peut vivre avec, à la louche, 150 euros par mois. Lui, non. Il survit, continue au quotidien à chercher du boulot et espère. Rien qu'un SMIC de plus à la maison et ce serait le bonheur. Forcément, quand on a rien...

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